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Choix cornélien et potentiellement décisif, le fait de commencer avec le vent de face ou dans le dos peut tout changer. Mais quels critères prendre en compte en avant-match ?

Mistral, tramontane ou petite bise, pas un stade en France dans lequel il soit le bienvenu. “Le vent, je l’avais en horreur. Il nivelle les valeurs et tire le jeu vers le bas”, estime Alain Blachon, l’ancien adjoint de Guy Lacombe et Claude Puel. Même son de cloche chez Emerick Darbelet, le coach-adjoint du Rodez Aveyron Football en Ligue 2 : “On ne peut pas imaginer pire ennemi du jeu. Quel que soit leur niveau et leur qualité, je n’ai jamais vu un joueur se réjouir de devoir disputer une rencontre avec des rafales balayant le terrain”. Serge Pacholski, entraîneur du Sporting Club Saint-Martinois (D3) dans les Bouches-du-Rhône, fait part de l’incidence de cette composante météorologique dans le déroulement d’une saison : “Par chez nous, le mistral souffle un certain nombre de jours dans l’année. On n’aime pas ça mais on apprend à faire avec parce que l’on sait qu’on y sera confrontés à plusieurs reprises.

 

“Commencer avec le vent car il peut tourner…”

 

S’ils confient bien volontiers leurs désagréments de devoir composer avec cet élément, tous se rejoignent sur l’obligation de s’y adapter. Parmi les ajustements nécessaires, la question de savoir s’il convient de démarrer avec le vent ou bien contre, pour peu que le “toss” soit gagné. “Je conseille de commencer dans le sens du souffle. Tout simplement parce qu’il peut tourner ou caler dans le courant de la rencontre”, affirme Alain Blachon. Une preuve de bon sens reprise à l’unisson par les différents techniciens. Cependant, si le point de vue pragmatique ne semble souffrir d’aucune contestation, la plupart pointe un lien entre le niveau technique des joueurs et leur aptitude collective à décliner le projet de jeu de l’équipe sous les bourrasques : “Plus une formation maîtrise les remontées de balle, plus elle s’appuie sur des circuits de passes courtes, et moins elle souffre de l’impact de l’air”, précise ainsi Mickaël Boully, l’entraîneur des gardiens du Paris FC (Ligue 2). Des paroles confirmées en creux par Serge Pacholski au sujet des joueurs amateurs : “Dans les niveaux départementaux, la qualité technique des joueurs ne permet pas toujours d’assurer la progression du jeu ligne par ligne contre le vent. C’est pourquoi je demande que l’on commence avec, en espérant prendre l’avantage assez rapidement. Par expérience, je sais que l’objectif consiste le plus souvent à marquer un but de plus que l’adversaire dans la mi-temps disputée dans les conditions favorables.” Une unanimité qui n’entend cependant pas éluder l’impact des consignes exprimées par les coachs en pareille circonstance. Première ligne évoquée par Emerick Darbelet, celle des attaquants : “Vent dans le dos, on demande aux attaquants de ne pas hésiter à tenter leurs chances, même si les conditions de frappe ne sont pas toujours optimales. Idem sur les centres qui peuvent se convertir en but à la faveur d’une bourrasque ou induire les défenseurs en erreur sur leur lecture de trajectoire. Défensivement, on peut leur demander d’accentuer les phases de pressing sur des défenseurs qui peineront sans doute à trouver leurs partenaires vers l’avant. Contre le vent, en revanche, on leur rappellera de suivre tous les ballons en profondeur, même s’ils semblent injouables, parce qu’il peut les freiner et mettre les gardiens en grande difficulté dans leurs appréciations.

 

“Contre le vent, moins de jeu direct et plus de passes courtes”

 

Autre poste, autres consignes évoquées par Alain Blachon pour les titulaires de la ligne de défense : “En possession et contre le sens des rafales, les défenseurs vont devoir privilégier les relances courtes et éviter les ballons longs aériens qui vont immanquablement revenir et représenter autant de munitions pour les adversaires. Moins de jeu direct donc et plus de séquences à base de passes courtes. Défensivement en revanche, la difficulté consiste à gérer l’espace dans leur dos et les passes profondes en fonction du cadrage du porteur, surtout si le bloc évolue haut. À proximité de notre but, on insiste sur la nécessité de sortir sur les joueurs à distance le plus rapidement possible pour empêcher les tirs.” Commencer avec le vent si possible, adapter le plan de jeu aux conditions et donner des consignes spécifiques qui tiennent compte des circonstances, voilà donc selon nos intervenants, les clés d’un match réussi par grand vent.

Des consignes particulières pour le gardien ?

Mickael Boully, l’entraîneur spécifique des derniers remparts du Paris Football Club assure que “parmi toutes les conditions météorologiques, le vent est celle qui génère le plus d’incertitude, voire d’inquiétude pour les gardiens.” Dans ce cas, il adresse des directives claires : “Contre le vent, l’anticipation de la profondeur s’avère primordiale. L’accent sera mis sur la gestion de l’espace situé entre le gardien de but et la ligne de défense. Avec le vent, le portier évolue souvent plus haut pour raccourcir le bloc. Ce qui est logique mais implique aussi un risque puisque, à haut niveau, les joueurs prennent l’info très rapidement et la possibilité d’un lob existe si le porteur se retrouve libre. Dans un cas comme dans l’autre, ce sont des points de détail que l’on doit aborder à l’entraînement. En effet, avant un match, je regarde toujours les prévisions météo. La température estimée, le risque de pluie et bien sûr s’il va y avoir du vent. J’essaie aussi de considérer la configuration des stades. En pro, la plupart sont bien fermés, mais certains, comme celui de Istres par exemple lorsque le club évoluait dans l’élite, sont ouverts en plein vent. Ce qui peut exercer une influence considérable sur le jeu. D’où la nécessité de préparer en amont, à l’entraînement, avec un travail sur des situations proches de ce qu’il va trouver en match.

“Exploiter le vent sur le plan pédagogique !”

Nous avons sollicité Yves Débonnaire, le responsable des sélections nationales jeunes de la Fédération Suisse de Football, pour savoir si l’on pouvait avoir une utilisation pédagogique du vent. “Dans le football d’animation, je ne pense pas qu’on puisse vraiment orienter le contenu d’une séance d’entraînement dans ce sens. Les plus petits, il faut juste les laisser jouer et ne pas les embêter avec des plans de jeu. Chez les jeunes en revanche, à défaut de concevoir une séance sur le thème, on peut exploiter les inévitables difficultés liées à sa présence. Avec le vent, le jeu perd le plus souvent en cohérence. Il s’agit d’un facteur de déstabilisation et de pertes de repères, donc paradoxalement d’apprentissages. Selon moi, il faut aller au plus simple. Le propos du coach peut alors se résumer à quelques mots.” Du genre : “Mettez le ballon au sol et trouvez des solutions !” Faire appel aux capacités d’adaptation et à l’intelligence du joueur, sans doute l’acte le plus éducatif qui soit !

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